C'est une forme d'expression typiquement antillo guyanaise. Pour ceux ki n'ont pas compris, demandez à toutes les antillaises et guyanaises autour de vous !! Un peu long mais très instructif..... La Belle Histoire du TCHIP ? un peu de lecture!!
- Mademoiselle? Mademoiselle? - Oui? C'est pour quoi? - Pardonnez mon audace, mais vos parents ne seraient-ils pas de grands voleurs par hasard ? Car ils ont pris toutes les étoiles du ciel pour les mettre dans vos yeux... TCHIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIPPP!!!

Cette scène ne vous rappelle rien ? Non, vraiment ? Et pourtant elle est bien fréquente chez nous aux Antilles Guyane. Elle met en évidence d'ailleurs, cet outil indispensable à la ponctuation kréolite: le tchip. Pourquoi ? Pourkwaaaaa ? Me direz vous.
C'est simple en fait. Le français moderne néo-montesquien du XXIème siècle, ne donne à ses phrases, n'ayons pas peur des mots, aucun feeling.

Le créole, lui, parvient à accentuer la signification des différentes propositions selon l'humeur des interlocuteurs. Et cela, grâce à un outil linguistique exceptionnel, qui parvient à remplacer une lourde ponctuation, et exprimer dans le même temps une série d'impressions liées au contexte général : d'où une nouvelle économie de mots.

Disons le haut et fort : le tchip est l'outil linguistique contemporain le plus fabuleux qui soit ! Mais comment l'utliser ?

Sa prononciation : Le tchip est le résultat d'une prouesse labiale époustouflante. La bouche semi-ouverte (certaines femmes très entraînées parviennent à le faire la bouche fermée) , il provient d'une pression de la langue sur le palais, suivie d'une succion du stock salivaire situé juste en dessous. La portée elle, s'obtient par un décollement progressif des lèvres inférieures et supérieures, accentuer le son.
Du reste, le tchip peut être long, court, semi-long, sec, ou saliveux, tout dépend de l'effet linguistique qu'on lui destine. Voyons donc quelques points grammaticaux essentiels à sa correcte utilisation dans la phrase.


Le plus simple, il est d'usage courant et fréquent. Ola soulié an mwen passé -tchip- Ha ! Mi yo. (Où sont passé mes chaussures ? Ahh les voici) (créole guadeloupe)

Remarquez la place du tchip, entre deux propositions ; il remplace le point au même titre qu'un "hein", ou un "ha ha", mais possède contrairement à eux moins de portée exclamative. En réalité, son rôle est plus subtil. Il se prononce rapidemment ; il est sec et parfois (ça vaut mieux dans un discours devant le préfet) presque inaudible. Il exprime l'agacement léger, sans conséquences.

Plus significatif, Josef a effectivement trouvé ses chaussures: Mésieuuuu, gadé ki sa chien an fè ké mo soulié -tchiiiiip- (Bordel ! Regardez ce que le chien a foutu avec mes chaussures !!) (créole guyane)

Ici, le tchip est en fin de phrase. Il remplace un point d'exclamation inutile parce que muet ; le ton de la phrase étant descendant, ce tchip paraît tout à fait approprié pour achever la proposition de Josef qui a accumulé dans la bouche son stock de salive. Il est donc très liquide, et exprime de ce fait l'exaspération certaine vis à vis du chien parce que bèt a tro kouyon menm. (le chien est con qd même)

Josef, to ké di mo a ki kalité lanmès to ka alé ké sa soulié sal (Josef, tu vas à quelle messe, là , avec des chaussures aussi sales ?) (creole guyane)

Très similaire en apparence au tchip exclamatif ; toute la différence tient dans l'intonation. Celui-ci est légèrement plus court que le précédent, et moins saliveux, mais il est de toute évidence plus sonore, et intervient sur un ton aussi montant que l'agacement de la mère de Josef qui constate chez son fils un manque cruel de respect pour le Seigneur.

Sa ki ni frèw, mwen ka présenté ou copine mwen
Je te présente ma copine Caroline (Josef, toujours au sortir de la messe) Arreté frèww, sé copine ou ki la ? -kitchiiiiiiiiip- (Arrête de déconner frère, c'est ta copine, elle ??) (créole martinique)


-Kitchiiiiiiiiip-

Caroline, toisant à l'antillaise les amis de Josef : Alors Josef, mwen lévé gran bonè matin -tchip- é sé pou rencontré dé kalité chyen malprop' kon sa, ki pa sa kimbé grenn a yo adan on menm islip lè yo ka vwè fanm ka pasé ? TCHIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIPPP

(silence des amis de Josef ki ja ni la wront) (qui ont déjà la honte) (creole guadeloupe)

Dois-je faire un commentaire ? Si peut être, car il faut le préciser, le tchip long est une spécialité féminine. Sentez la charge de mépris qui réside dans la longeur saliveuse de ce tchip. Et encore, car de là , vous ne pouvez apprécier la contorsion de la bouche en arc de cercle, nécessaire à Caroline pour envelopper sa phrase de dédain supérieur et culpabilisant.
Il demeure inutile de vous préciser que ce genre d'exclamations s'entend à 130 mètres à la ronde en moyenne (record à 556 mètres) et que l'effet de honte est total.
Voilà , cette liste est dans les grandes lignes, assez exhaustive. Elle englobe les formes les plus usitées de tchip qui existent en ce bas monde. Mais l'univers de cette clef de voute du kréole moderne est très évolutif. Si vous entendez des formes inédites d'utilisation du tchip ou des versions remixées (voire remasterisées), n'hésitez pas à nous les faire partager sur GY !!!!
